Le SER très préoccupé par le retard des EnR sur les objectifs de la PPE
Pour le Syndicat des énergies renouvelables (SER), la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) doit permettre à la France de répondre à ses engagements européens afin de contribuer à atteindre 32% d’énergies renouvelables (EnR) dans le bouquet énergétique d’ici 2030 en Europe. En France, les objectifs se situent à 23% d’EnR dans le bouquet énergétique d’ici 2020, et 32% d’ici 2030. Or, le rythme de déploiement des EnR est depuis 2011 de plus en plus nettement en-deça de la trajectoire permettant d’y parvenir. En préparation pour fin octobre, la prochaine PPE 2018-2028 devrait, selon le SER, rectifier les trajectoires pour toutes les filières mais aussi donner les moyens de les suivre afin d’atteindre les objectifs de la loi de la transition écologique pour une croissance verte (LTECV).
Fin 2016, la France avait réalisé les deux-tiers de son objectif EnR 2020. Deux ans après, nous en sommes à peu près aux trois-quarts. Si rien ne change, l’objectif ne pourra être tenu et l’évolution n’est pas de bon augure pour les années suivantes et l’objectif 2030. Or la baisse des coûts des EnR les rend incontournables dans notre futur système énergétique. Leur compétitivité accrue n’est en outre plus à prouver si l’on tient compte des récents prix moyens de production obtenus à divers appels d’offres, avec notamment 52,1 euros/MWh pour des installations photovoltaïques au sol de plus de 5 MW. Elle devrait même faciliter l’accélération de leur déploiement. De plus, tous les sondages le montrent : une très large majorité de Français est favorable aux EnR. Une étude réalisée en 2007 par l’Ademe donnait ainsi 93% d’avis positifs.
La LTECV avait fixé des objectifs EnR réalistes pour chaque usage à l’horizon 2030 : 38% dans la consommation finale de chaleur ; 40% dans la production d’électricité ; 10% dans la consommation de gaz ; et 15% dans la consommation finale de carburant. D’après le SER, ces objectifs pourraient être dépassés grâce, notamment, à l’avancée des technologies et à la baisse des coûts mais aussi à l’évolution des usages. Dès janvier dernier, le syndicat a dévoilé ses propositions et scénarios en vue de la révision de la PPE et pour construire le nouveau modèle énergétique français. D’ici 2030, les EnR seraient ainsi capables de couvrir 41% de notre consommation finale de chaleur, plus de 50% de notre production d’électricité, 15% de la consommation finale de carburants, et 30% de la consommation de gaz en France.
Dans l’électricité renouvelable, le SER milite aujourd’hui pour une poursuite de la dynamique engagée. « L’objectif de 40% de production d’électricité renouvelable est à notre portée, et le taux peut être porté à plus de 50%. Selon le panorama de l’électricité renouvelable au 30 juin 2018, l’électricité renouvelable couvre 22% de l’électricité consommée sur une année glissante, et ce taux est monté à 31% au 2e trimestre 2018 », souligne Jean-Louis Bal, président du SER. Pour augmenter ce taux, la mise en place d’un calendrier d’appels d’offres jusqu’en 2024 pour l’éolien en mer (posé et flottant) serait notamment souhaitable.
Pour la chaleur renouvelable, d’importants efforts sont également indispensables pour revenir sur la bonne trajectoire. Malgré la montée en puissance de la production de chaleur à partir d’énergies renouvelables et de récupération (EnR&R), la tendance de production annuelle de chaleur nous démontre en effet que les différents objectifs établis dans la LTECV et la PPE ne pourront être atteint sans effort supplémentaire, notamment via une augmentation de l’enveloppe budgétaire actuelle du Fonds Chaleur*. La chaleur représente plus de 60% de la consommation d’énergie en France, et près de 60% de l’objectif de développement des EnR. Pour atteindre les objectifs PPE de chaleur à l’horizon 2023, il faut installer 640 ktep par an à partir de cette année. Le plus gros de l’effort repose sur les installations bénéficiant du Fonds Chaleur. Or, ce dernier porte une moyenne de 240 ktep supplémentaires par an depuis 2009, ce qui ne sera pas suffisant.
Le SER demande à minima un doublement du Fonds Chaleur à compter de 2019 afin d’envoyer un signal fort aux porteurs de projets et d’enclencher une dynamique positive et soutenue d’investissements dans ce secteur. Le Président de la République, Emmanuel Macron, s’est d’ailleurs engagé, dans son programme de campagne, à doubler le Fonds chaleur pour atteindre 400 millions d’euros. L’étude d’impact de la LTECV prévoyait 500 millions d’euros par an pour le renforcement de l’enveloppe afin d’atteindre les objectifs. Il est en outre nécessaire, en parallèle du doublement du Fonds Chaleur, de créer les conditions de marché qui rendront les filières de chaleur renouvelable compétitives par rapport aux énergies fossiles. Les faibles prix actuels de ces dernières freinent en effet le développement de projets. Des mesures comme l’augmentation soutenue et prévisible de la taxe carbone (CCE) ou encore une simplification des critères et des démarches pour bénéficier du Fonds Chaleur doivent être mises en œuvre.
Pour le SER, la nouvelle PPE doit permettre à la France de répondre à ses engagements européens. Pour ce faire, un projet de plan d’action national devrait être présenté d’ici fin 2018.
*Le Fonds Chaleur est un dispositif financier piloté par l’Ademe, lancé en janvier 2009 dans le but de soutenir le développement de la production de chaleur à partir de sources renouvelables et de récupération (biomasse, géothermie, solaire thermique, pompes à chaleur, biogaz, déchet et réseaux de chaleur associés) en incitant au remplacement d’installations existantes utilisant des énergies fossiles ou à la mise en place de nouveaux équipements. Il est destiné aux entreprises, collectivités, agriculteurs souhaitant s’équiper de systèmes de production de chaleur utilisant les énergies renouvelables ou valorisant la chaleur de récupération. Le Fonds chaleur s’inscrit pleinement dans le respect des règles communautaires d’encadrement des aides publiques. L’enveloppe budgétaire de l’ADEME s’est élevée à 1,75 milliard d’euros entre 2009 et 2017, générant ainsi un montant d’investissement de 5,78 milliards d’euros. Il a accompagné 4 308 opérations d’investissements pour une production totale de près de 2,2 Mtep. Ce résultat démontre que le dispositif est adapté à sa mission, efficace et nécessaire.
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